Emprunté l'un des bouquins un peu connu et médiatisé de Nacira Guénif-Souilamas, auteure que je n'avais jusqu'alors jamais lue, mais pour laquelle j'avais le plus grand respect et bon-feeling-a-priori-positif : « Les féministes et le garçon arabe », coécrit avec Eric Macé (Editions de l'Aube, 2004).
Pas ce à quoi je m'attendais. Surprise, déstabilisation, et, je dois dire, déception, aussi.
D'abord, un constat : ce livre n'est pas écrit à deux mains, mais consiste en la simple juxtaposition de deux articles, l'un écrit par Eric Macé (tout seul), l'autre par Nacira Guénif-Souilamas (toute seule) ; seule l'introduction semble belle et bien écrite à vingts doigts. Deux articles que les deux gus avaient déjà publiés auparavant, en 2002 et 2003, dans Cosmopolitiques, et qu'ils collent ici l'un devant l'autre, en y ajoutant une petite intro version salade composée. Bon, pourquoi pas après tout.
Mais ce qui me fait un peu bizarre, avec ça, c'est que le titre du livre est finalement à l'image de cette juxtaposition : « Les féministes et le garçon arabe » - on s'attendrait à ce que l'on traite ici des relations (complexes, mouvantes, problématiques, sous plein d'angles d'approche...) entre les deux.
Mais c'est comme si Eric Macé avait pris le premier bout, « les féministes » (puisque dans son article, assez bon au demeurant, il n'est pour ainsi dire presque jamais question du « garçon arabe »), et Nacira Guénif l'autre bout – en faisant des circonvolutions autour du « garçon arabe », sans jamais vraiment aborder de front la question des LIENS entre ces deux constructions sociales / médiatiques / symboliques / culturelles – ou tout ce qu'on voudra. Pour le moins déstabilisant.
Tromperie sur ma marchandise !!
Qu'ils aient voulu publier ensemble, parce qu'ils sont sur la même longueur d'ondes, oui oui ; qu'il y ait là aussi un aspect stratégique – oui ; que le bouquin ait plutôt bien marché, ça me semble une bonne chose – mais mince, ils auraient pu tout de même un peu mieux creuser et collaborer et articuler, et... penser, non ?
L'article écrit par Eric Macé s'intitule « l'antisexisme est un postféminisme ou comment défendre l'individu contre les assignations de sexe » ; il fait une trentaine de pages. Je le trouve bien écrit, clair, synthétique – c'est un bon petit texte sympatoche, même si, me dit Acolyte spécialiste de ça, côté histoire, il est un peu léger et approximatif (histoire des mouvements féministes)... Ce qui me chagrine un peu, c'est que ce texte ne traite pas du garçon arabe, de l'islam imaginaire, du racisme, des constructions médiatiques, etc. - enfin, ça ne traite pas du titre du livre...!
L'article de Nacira Guénif-Souilamas est un vrai trou d'énigme pour moi.
Premier choc : le style. Lourd, chargé, alambiqué. Bourré de métaphores et de périphrases.
Deuxième choc : le terrain sur lequel elle se situe, le type d'arguments et de références qu'elle mobilise – de... l'imaginaire. Des racines. Bien loin de l'analyse locale.
J'en cause dans un tout prochain post...